J’élabore des environnements à l’intérieur desquels j’expérimente la présence du vivant et plus précisément du corps dans l’espace et le temps de l’exposition. Mes projets sculpturaux portent en eux un scénario d’activation, voir d’habitation tout en conservant leur  autonomie plastique. À travers la lenteur et l’immobilité, mes performances invitent au ralentissement et à la contemplation jusqu’à créer des images proches du tableau vivant, produisant une atmosphère particulière, poétique, tendue, parfois abstraite et incertaine. En travaillant avec le temps et l’espace comme une matière que les corps viennent sculpter, j’essaye de créer une nouvelle syntaxe qui interrogent nos modes de relation, de communication et notre promiscuité contemporaine. Différentes modalités d’apparitions me permettent de créer des situations qui interrogent et révèlent une porosité, une ambiguïté entre l’intime et l’impersonnel, l’intériorité et l’extériorité, la réalité et le rêve, la douceur et la violence, la retenue et la libération. Le geste pensé comme un prolongement sculptural est un moyen d’échapper à une forme définitive de monstration des œuvres. Dans ce potentiel de transformation, l’œuvre existe en deux temps, permettant alors d’explorer le rapport entre l’animé et l’inanimé, l’espace-temps pendant et après l’action.

« Les gestes, les mimiques, les postures, les déplacements expriment des émotions, accomplissent des actes, soulignent un propos ou le nuance, ils manifestent en permanence du sens pour soi et pour les autres »1. C’est à travers ces mots que j’entrevois une pratique chorégraphique, comme une tentative de résonance qui se déploie par des moyens de communications non-verbaux et des systèmes d’interactions entre le corps et l’objet. Les formes performatives développées prennent l’aspect de miniatures-chorégraphique et  d’activation d’objets précises tandis que leur intrication les unes par rapports aux autres se veut fluide, souvent improvisée et en constante négociation avec l’espace. Écriture chorégraphique et improvisation s’interpénètrent constamment et constituent une énergie centrale de mon travail.
Fanny Gicquel
1 David Le Breton, les passions ordinaires, 1998, Payot